PRISE EN CHARGE DE LA SURDITÉ ET ÉDUCATION DES JEUNES SOURDS AU BURKINA FASO

Un pays précurseur.
Le Burkina Faso a sans doute été un des pays pionniers dans la prise en charge spécifique des enfants sourds africains dans la seconde moitié du XXème siècle. Le Pasteur Abel KAFANDO y a fondé à Ouagadougou, la capitale, une des premières écoles de la sous-région et il a formé par la suite bon nombre des fondateurs des écoles du Togo, du Bénin, du Cameroun, etc. Lors des premiers Etats Généraux de la Surdité d’Afrique de l’Ouest et du Centre, en 2003 au Bénin, il avait été remarqué par l’ensemble des participants pour son engagement, son excellente connaissance des personnes sourdes et de leurs langues des signes et la pertinence de ses analyses. Les deuxièmes Etats Généraux de la Surdité, en 2006, au Togo, quelques jours après son décès brutal, lui avaient été dédiés.

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L’école inclusive.
Loin de reproduire à l’identique les modèles éducatifs qu’il avait étudiés au contact de pédagogues européens et américains, Abel KAFANDO, les avait déclinés selon des normes d’éducation inclusive assez révolutionnaires. A l’époque où les pays d’Europe se battaient eux aussi pour parvenir à cette intégration (puis inclusion) scolaire, il était bien sûr difficile d’intégrer les enfants sourds dans des écoles d’entendants aux classes surchargées, encadrées par des enseignants qui méconnaissaient ce handicap. Aussi, Abel KAFANDO a créé une école destinée à la scolarisation des enfants sourds puis, dans cet établissement dont l’enseignement a vite fait la preuve de sa qualité, il a peu à peu intégré des enfants entendants dont les familles étaient en recherche d’une scolarisation sérieuse et innovante. Ce modèle inclusif original a fait ses preuves depuis plusieurs décennies maintenant et a été suivi d’autres expériences au Burkina, mais aussi au Bénin et dans d’autres pays africains.

La situation actuelle au Burkina.
D’autres écoles se sont créées au Burkina, certaines en « filiation » du CEFISE de Ouagadougou, comme l’Institut des Jeunes Sourds du Faso de Bobo-Dioulasso, dirigé par Salam OUEDRAOGO. Ces équipes, partenaires du Professeur OUOBA, responsable du service d’ORL du CHU de Ouagadougou et Coordonnateur du Programme National de Prévention de la Surdité, ont organisé en 2011 à Ouagadougou les troisièmes Etats Généraux de la Surdité, témoignant d’un grand dynamisme et d’innovations certaines.
Thérèse KAFANDO, collaboratrice et épouse d’Abel, a pris le relais de la, direction du CEFISE et, entourée de professionnels compétents dont un orthophoniste burkinabè formé au Togo, elle dirige avec beaucoup de professionnalisme ce qui est maintenant un important complexe assurant l’éducation et la rééducation de plusieurs centaines d’enfants sourds de la maternelle au lycée (voir présentation ci-après). Le CEFISE multiplie les initiatives : création d’un service d’audioprothèse, élaboration d’un CD-Rom de dictionnaire de langue des signes, création d’un centre d’information sur la surdité, mise en place d’une équipe de sensibilisation sur l’éducation inclusive, les droits et la santé des personnes handicapées, etc.

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PRESENTATION DU CEFISE
Thérèse KAFANDO

Le Centre d’Education et de Formation Intégrée des Sourds et des Entendants (CEFISE) œuvre, comme son nom l’indique, dans les domaines de l’éducation, de la formation et de l’insertion sociale. Ses actions de solidarité sont portées vers les personnes déficientes auditives des communautés vivant au Burkina et dans la sous-région. Le CEFISE cherche à améliorer leur bien-être social et à faciliter l’accès à l’éducation qui demeure toujours un luxe pour bon nombre d’enfants en général et d’enfants handicapés en particulier. La structure compte près de 600 apprenants handicapés sourds et malentendants et de quelques autres enfants handicapés tels des malvoyants et des handicapés physiques.

Mission et objectifs.
Le CEFISE créé en 1988, a été reconnu en 1996 comme organisation non gouvernementale (ONG) de développement social, spécialisée dans l’Education inclusive, la prévention et la prise en charge de la surdité. Ses objectifs sont les suivants :
– favoriser une pleine participation des déficients auditifs au développement économique, social et culturel du Burkina Faso ;
– promouvoir l’éducation inclusive et la réhabilitation des personnes sourdes et malentendantes ;
– créer un cadre d’échange entre entendants et déficients auditifs pour favoriser la conduite d’activités socio-économiques venant en solution aux problèmes des sourds ;
– mener des actions de sensibilisation à travers des causeries éducatives et de dépistages.

Organisation et fonctionnement
Afin de réaliser sa mission et ses objectifs, le CEFISE œuvre dans les domaines suivants :
– l’éducation scolaire spécialisée depuis la maternelle et l’école primaire, jusqu’à l’enseignement secondaire général et technique,
– la formation et l’insertion socioprofessionnelle des personnes vivant avec un handicap ou non,
– la prise en charge des déficients auditifs et des entendants, dont l’âge est compris entre 3 et 25 ans, sans distinction de nationalité ni de confession religieuse.
Pour une éducation et des formations adaptées au phénomène de la surdité et un suivi de proximité, l’organisation a installé à l’intention de ses apprenants des services spécialisés tels l’audiologie, l’orthophonie, la psychologie de l’éducation.

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L’avenir.
En ce qui concerne les perspectives, le CEFISE, entre autres projets, prévoit de continuer l’extension de la structure par la construction de nouvelles infrastructures pour décongestionner les classes, de construire une école supérieure inclusive, une infirmerie et un verger. Toutes les actions sont dirigées vers les personnes handicapées et, par extension, à l’endroit des jeunes désœuvrés qui se comptent par milliers dans le pays. Cette vision participe de l’éradication de la délinquance, de la pauvreté et pour le respect de la dignité humaine. Pour tous ces efforts, le CEFISE a été plusieurs fois félicité par l’Etat burkinabè avec des distinctions honorifiques.

EN CONCLUSION

L’évolution de la prise en charge des enfants en situation de handicap en général, et des enfants sourds en particulier, au Burkina Faso, est bien entendu compliquée par les difficultés économiques et contextuelles du pays et de la sous-région. Toutefois les expériences du CEFISE, de l’IJSF, etc, sont représentatives du professionnalisme et du dynamisme de nos collègues burkinabè.

En élargissant le focus au-delà des problématiques liées à la surdité, on peut mentionner que six orthophonistes travaillent maintenant au Burkina . Ils assurent des rééducations de toutes les pathologies du langage et de la communication et, au sein de l’Association Burkinabè pour l’Orthophonie qu’ils ont créée, ils mettent en place bon nombre d’actions de dépistage et de sensibilisation. Ce qui représente une grande chance et beaucoup d’espoir.

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